Kodomo No Kuni trois expositions sur les aires de jeux au Japon sous le commissariat de Vincent Romagny

Soutien à la recherche en théorie et critique d'art
Projet soutenu par le Cnap
Exposition
Arts plastiques
Micro Onde - centre d'art contemporain de l'Onde Vélizy-Villacoubaly

« Kodomo No Kuni » signifie, en japonais, « le pays des enfants ». C’est le nom d’un parc pour enfants, situé à Yokohama, dont l’inauguration le 5 mai 1965, le jour de la fête traditionnelle des enfants par l’empereur du Japon, coïncide avec la déclaration officielle du gouvernement japonais selon laquelle le pays en a fini avec les reconstructions de l’après Seconde Guerre mondiale. Isamu NOGUCHI y construisit sa première aire de jeux, tandis que l’avant-garde de l’architecture japonaise, les métabolistes (Kyonori KIKUTAKE, Kyoishi KUROKAWA, et Sachio OTANI, sous la houlette de Takashi ASADA) y réalisèrent quelques-uns de leurs premiers bâtiments, cinq ans avant l’exposition universelle de 1970 d’Osaka.

Maintenant disparus ou en ruines, les vestiges de ces constructions cohabitent avec des générations ultérieures d’aires de jeux accumulées dans un parc dédié principalement à une nature foisonnante. Le parc conserve également le souvenir de la guerre : il est parsemé de portes blindées donnant accès aux abris souterrains où étaient stockées des munitions de l’armée impériale. C’est un parc que tous les japonais connaissent ou dont ils ont entendu parler, quand bien même ils n’y seraient pas allés.
Kodomo No Kuni peut être compris comme une réponse aux cataclysmes naturels et humains ayant concouru à écrire l’histoire traumatique du Japon. Déjà en 1923, après le séisme du Kanto qui eut pour conséquence la destruction de la plaine de Tokyo et Yokohama, une loi d’urbanisme imposa que toute maison construite soit située à moins de 500 mètres d’un terrain sur lequel la population pourrait se réunir (les incendies qui suivirent le séisme provoquèrent plus de morts que le séisme lui-même). Ces terrains accueillirent peu à peu des aires de jeux dont les japonais importèrent le modèle des États-Unis. Enfin, depuis le séisme de Tohoku de 2011 qui entraîna la catastrophe de Fukushima, les éléments de mobilier de ces places sont conçus pour être transformés en abris et pour fournir des moyens de subsistance. De même, nombre d’interventions à visée thérapeutique pour aider les enfants traumatisés ont été réalisées avec des aires de jeux ou adventure playgrounds.

Célébrer l’enfance n’est-il pas le meilleur moyen d’annoncer le début d’une nouvelle ère ? Kodomo No Kuni n’est pas juste un lieu physique et réel : c’est aussi, le signe du recours à l’enfance pour survivre aux traumas. C’est le Youkali de la chanson de Kurt Weil, le Neverland de Peter Pan. Kodomo No Kuni révèle l’importance de l’enfance pour survivre à la débâcle, c’est un lieu physique autant que psychologique, universel. Ce passé traumatique, et le recours à l’enfance qu’il peut susciter, est une question récurrente dans l’art japonais, qu’il s’agisse des artistes Gutaï cherchant dans l’enfance des gestes inconditionnés et radicalement nouveaux, jusqu’à une nouvelle génération d’artistes qui revient sur son oblitération.

Le cycle d’expositions Kodomo No Kuni, Kodomo No Kuni – Enfance et aires de jeux au Japon à Micro Onde, Centre d’art de l’Onde à Vélizy-Villacoublay, Kodomo No Kuni – Mémoire et enfance au Japon à La Maréchalerie à Versailles et Kodomo No Kuni - Replay au FRAC Grand Large – Hauts-de-France à Dunkerque, propose une sélection d’oeuvres d’artistes contemporains, principalement japonais, qui reprend ici le fil rouge des expositions du cycle Aires de jeux initié en 2010 au Centre d’art de l’Onde (Aires de jeux – contre-emplacements) et au Centre d’art du Quartier à Quimper (Aires de jeux – la police ou les corsaires). Kodomo No Kuni est ce lieu réel et historique, un territoire qui agrège les sédiments de la guerre, de la reconstruction, ainsi que des générations d’aires de jeux. On l’aura compris, c’est un lieu tout autant métaphorique que l’on approchera notamment par un objet et un thème : l’aire de jeux et la mémoire.

Kodomo No Kuni – Enfance et aires de jeux au Japon
Micro Onde, Centre d’art de L’Onde à Vélizy-Villacoublay du 7 avril au 30 juin 2018
Avec les oeuvres de Kasumi FUJISAWA, Le Gentil Garçon, Tadashi ONO, Kohei SASAHARA, Mitsuru SENDA, SHIMABUKU, Mayu SOEDA, Constance SOREL, Soni TAKEURA, Mutsumi TSUDA et Yohei YAMAKADO.

Kodomo No Kuni – Mémoires et enfance au Japon
La Maréchalerie, Centre d’art contemporain à Versailles du 17 mai au 8 juillet 2018
Avec les oeuvres de Susumu HANI et Yusuké Y. OFFHAUSE.

Kodomo No Kuni – Replay
Frac Grand Large-Hauts de France à Dunkerque du 26 janvier au 24 mars 2019
Avec les oeuvres des deux expositions précédentes.

Vincent Romagny a bénéficié en 2013 d’un soutien en théorie et critique d’art du Cnap pour sa recherche sur les aires de jeux. Anthologie. Aires de jeux au Japon, l’ouvrage à paraitre chez Tombolo presses a reçu en 2017 un soutien à l’édition.

Adresse

Micro Onde - centre d'art contemporain de l'Onde 8 bis avenue Louis Bréguet 78140 Vélizy-Villacoubaly France
Dernière mise à jour le 2 mars 2020