De l'authentique aujourd'hui
A l’heure où la photographie procède souvent d’une prise rapide et facile avec un téléphone ou une tablette numérique, Sebastian Riemer incite le spectateur a ré-expérimenter tant l’aspect esthétique que le signifiant de l’image photographique.
C’est le cas notamment quand il travaille sur des images trouvées dont il décale le contenu pictural par des manipulations techniques ou la reproduction dans un nouveau format. Bien que les images provenant de diverses sources - allant des Daguerréotypes du XIXeme siecle aux photographies de presse de l’après guerre - illustrent des temps et des personnes du passé, elles sont aussi matière à questionner l'image contemporaine.
" De l’authentique aujourd’hui » (das Originale unserer Zeit) est le slogan d’un producteur de vaisselle allemand, représentatif de l’esprit postmoderne de la société de consommation au début des années 90. En photographiant ce slogan sur l'une des enseignes du magasin, juste avant sa démolition, Riemer crée une œuvre qui délivre un titre emblématique à sa deuxième exposition personnelle à la Galerie Dix9.
Le travail photographique de Riemer bouleverse l’idée traditionnellement admise de la photographie du point de vue de son contenu en même temps qu’il interroge sa tradition et sa fonction. Par son approche technique et théorique hautement précise, par le choix méticuleux des sujets , les œuvres de Riemer invitent le spectateur à questionner autant le medium que le message qu’il transmet.
La danse
Dans l’histoire de l’art, la représentation de la danse a toujours été une histoire de la séduction. Le personnage de Salomé, qui après avoir charmé Hérode de sa danse réclama la tête de Jean Baptiste, en donne un bon exemple. Alliée à des motifs de temples, la danse devient également un acte rituel destiné à apaiser les dieux. Danser se fait alors un acte de flatterie ; dans l’accomplissement du mouvement réside toujours le potentiel de la conquête et de la manipulation.
Sebastian Riemer se réfère délibérément à ces connotations de la danse et les transpose à la fonction de la photographie. Car la photographie elle aussi envoûte son spectateur de par son inconditionnelle exigence d’authenticité. Elle génère notre réalité sans se dévoiler sous ses traits les plus trompeurs. Cette stratégie est particulièrement visible dans les photographies de l’époque coloniale : Le phénomène de l’exotisme peut ainsi être considéré comme un produit des mises en scène photographiques du 19ème siècle, qui, sous le couvert d’une représentation objective, créa de toutes pièces l’idée du « sauvage » et de l’« étranger ».
Les poses figées des photographies de presse sélectionnées par Riemer sont des fragments de mouvement. Le geste pétrifié se transforme en une relique d’une architecture du mouvement encore incomplète. C’est à ce point de touche que se niche le potentiel manipulateur de la photographie, cette grande séductrice d’aujourd’hui.
Tarifs :
entrée libre