GARAGE

Christophe Cuzin, Jacques Floret et Cyril Hatt
Exposition
Arts plastiques
le quai 294M9 / la gare Saint-Maurice-lès-Châteauneuf

Cette année, Esox Lucius investit un espace nouveau et vaste mis à sa disposition par un propriétaire privé sur la commune de La Clayette. Il s’agit d’une exposition collective invitant différents médiums d’expressions à se côtoyer dans un dialogue graphique et coloré (dessins, peintures, installations, photos…) Les artistes produiront leurs œuvres in situ en lien avec le contexte local. Ils auront de nouveau à composer avec un lieu chargé d’histoire même si celle-ci n’est pas si lointaine. En effet, après avoir occupé durant trois années, les espaces d’une demeure du XVII, c’est dans un garage des années soixante que l’association proposera son exposition d’été. L’espace vaste de ce local nécessite la présence d’œuvres fortes pour qu’elles existent et ne soient pas écrasées par une architecture intérieure chargée. C’est donc logiquement que le travail de Christophe Cuzin, Jacques Floret et Cyril Hatt s’est imposé dans l’élaboration de cette exposition. Elle a nécessité un important "chantier" lors de la résidence des artistes qui dura une quinzaine de jours. Trois jeunes étudiantes fraichement diplômées (avec mentions) de l’école des Beaux Arts de Clermont Ferrand ont assisté Christophe Cuzin pour la réalisation technique de son projet. Le travail de Christophe Cuzin qui se réfère souvent à Felice Varini (cf siège social de Peugeot situé 75 Avenue de la grande Armée à Paris) s’attache depuis toujours à l’architecture en perturbant notre appréhension de l’espace par un jeu chromatique énergique et plein d’humour. C’est au rez de chaussée que Christophe Cuzin s’est installé. Il y est accompagné par Cyril Hatt dont les sculptures "trompeuses" participent à la déstructuration du lieu. À l’étage, un ancien appartement sera, quant à lui, consacré au travail de Jacques Floret, dessinateur dont l’humour est teinté d’absurde. Le travail de Christophe Cuzin Pas de tableau. Pas de stock. Et rien dans les poches. Dans un premier temps, le peintre Christophe Cuzin s’engage à flux tendu dans la couleur avec ses deux seuls outils : un ordinateur portable et le nuancier générique RAL. Vient ensuite le rouleau et ses pots de peinture industrielle. Le lieu devient alors tableau/espace en trois dimensions. Christophe Cuzin est un habitué des interventions dans l’architecture, puisqu’il l’a choisie comme support à sa peinture depuis 20 ans. Il est à la fois dessinateur, peintre et constructeur. Ses interventions plastiques mettent en œuvre, se concentrent et contextualisent des “endroits”, des “lieux” et non des “objets d’art”. Sa démarche s’origine à la fois chez Giotto, peintre et architecte florentin (1266-1337) et Sol Lewitt, artiste minimaliste américain (né en 1928) dont il fut l’assistant, plus précisément le délégué, puisque Sol Lewitt confie par délégation, la réalisation de ses peintures murales. Christophe Cuzin emprunte donc à ses ascendants, européens et américains. Chistophe Cuzin parle de son projet : une exposition en lien avec l’histoire locale "J’ai peint avec les trois couleurs primaires, pas vraiment celles du Corbusier ou de De Stijl, pas plus celles du cercle chromatique, mais plutôt celles de mes souvenirs. Je me souviens qu’en 1967 beaucoup de stations services comme Caltex, La Mure, Avia… perdirent leurs noms et leurs images. Ces marques furent remplacées par un grand rond rouge peint sur les façades des stations services. Quel que soit le relief de l’architecture, un rond rouge posé brutalement, face à la route, sans nom, juste une forme et une couleur. Puis elles devinrent Elf. Le jaune et bleu, c’était l’écusson Peugeot, avec le lion au milieu. C’étaient aussi les garages peints de ces deux teintes, mon vélomoteur BB Peugeot, les voitures de courses, les boîtes de pièces détachées, l’équipe de foot de Sochaux… Je sais que ce garage s’appelait Jugnet, que c’était une concession Peugeot, qu’Anne-Marie, une artiste dont j’apprécie et estime le travail, est de la famille du concessionnaire, et qu’Anne-Marie habitait au 230 rue Saint Charles à Paris. Tout cela m'est arrivé. Pour la première fois, j’ai importé la silhouette d’une architecture dans une autre. Habituellement, je peins sur le modèle, mais cette fois, j’ai intégré l’architecture du garage de mon père dans celle du garage du cousin d’Anne-Marie. D’autre part, de ce bourg est originaire une amie avec qui j’ai enseigné plusieurs années à l’École des beaux-arts de Clermont-Ferrand où nous avons échangé nos envies du monde et de son partage, une personne dont je suis fier d’être contemporain." Toutes ces circonstances ont donné un caractère particulier au projet porté par Esox Lucius. Le monde est petit et à la fois tellement vaste à découvrir… lorsque l’on a soif de découvertes… EXTRAIT DE PARTICULES N° 28 AVRIL/JUIN 2010 Le rapport à la modernité Supports /Surfaces, BMPT, les questions sur l’objet, l’épaisseur de la peinture, la tranche, le châssis, le monochrome, la couleur, la planéité ; tout cela constituait le contexte de mes études. Aujourd’hui, cela m’excite de pousser la question jusqu’au bout. Si je peins au rouleau sur un mur, est-ce que c’est encore une œuvre ? Est-ce que cela parle de la couleur ? Comment poursuivre la déconstruction du tableau et l’impersonnalité d’un geste ? Ce que je souhaite avant tout, c’est que des gens puissent ce dire en voyant mon travail qu’ils peuvent en faire autant et s’ils n’ont pas ce sentiment alors je ne vois pas la nécessité de faire l’œuvre ; parce que la véritable interrogation, ce n’est pas comment cela a été fait mais de ce demander pourquoi on le fait. Ce sont ces réflexions qui m’ont amené vers la non prouesse, voire la délégation du travail. Je ne sais toujours pas si je suis figuratif ou abstrait. Souvent je me sens plus figuratif que les peintres figuratifs dans la mesure où je représente ce sur quoi je peins, c’est à dire l’architecture du lieu, qui elle est bien concrète. Pourtant, je ne repousse pas la forme abstraite, je la défends avec énergie. Je trouve d’ailleurs assez significatif que la peinture qui est déclarée morte à peu près tout les dix ans, renaît toujours par la figure. J’en conclu que c’est l’abstraction que l’on veut tuer, comme si la peinture n’était destinée qu’à la figuration. L’abstraction suisse avec des artistes comme Stéphane Daflon ou Philippe Decrausat a bien une actualité mais, pour moi, c’est une iconographie clichée des années soixante-dix. Je ne crois pas à une abstraction qui revendique une forme, mais juste un clin d’oeil. La couleur avant tout La couleur est le sujet de mon travail, elle me fascine encore, même si elle n’est que lumière. Cela me plaît de faire un métier qui n’emploie que cela, que mes outils ne soit que de la lumière. Je ne comprends toujours pas comment le jaune est jaune. Je pourrais étudier les phénomènes physiques et chimiques mais je préfère rester dans la magie et j’ai l’impression que le souvenir de la couleur est un peu comme le souvenir du parfum, quelque chose de très précis mais que l’on aurait du mal à attribuer à telle ou telle personne. J’ai choisi la nomenclature RAL, ces couleurs étalon qui ont pour but de pourvoir l’industrie et l’artisanat comme la plupart des architectes. J’ai toujours employé, même pour mes tableaux, de la peinture en bâtiment, d’une part parce que c’est moins cher et d’autre part parce qu’elle est la plus mate, qu’elle n’a pas de jeu de reflets, elle avale. Comme je peins souvent d’importantes surfaces, au minimum dix mètres carrés, je me suis aperçu que cette couleur crée un espace autour d’elle : par exemple un monochrome rouge RAL crée un espace rouge d’une profondeur d’environ un mètre vingt. Je ne sais pas ce que je peux faire de cela mais c’est passionnant et c’est pourquoi je parle d’immersion. La couleur devient une matière en volume. Les éclairagistes n’interviennent jamais dans mon travail, j’utilise toujours la lumière naturelle ou celle du lieu. J’ai parfois utilisé la lumière au sodium basse pression, car je suis fasciné par la lumière des tunnels, elle est la seule à être monochrome, c’est presque une couleur et quant on la met dans un lieu d’art, c’est magique. J’ai même fait une exposition appelée Sodium qui était éclairée par ce moyen et j’ai peint les volumes dans des couleurs primaires : si bien que le publique avait du mal à identifier les couleurs. Le travail de Jacques Floret Jacques Floret a exposé son premier dessin le 14 septembre 1993 à Chambéry. Les expositions se sont ensuite multipliées en France et à l’étranger. Ses dessins à la ligne claire aiment faire des zig-zags entre humour et absurde. Ligne droite assurée vers l'hilarité et une certaine perplexité. Il a publié un recueil de dessins Alf-moi partout aux Editions du Jour/Agnès b. et il réalise de nombreuses illustrations pour, entre autres : Le Monde, Le magazine littéraire, Technikart ou encore : Les Inrockuptibles, XXI, et la marque APC. Jacques Floret conçoit également les affiches et les pochettes d’album des labels indépendants Plastac, Herzfeld et Pif paf records. Souvenirs/mémoires : Avez-vous suivi des études dans une école d’art ? Oui, dans une école classique d’art. J’y avais un groupe d’amis. Tout était sujet à réflexion, discussion, prise de position assurée, débat sans fin. Nous étions assez arrogants. Nous tentions des réponses étranges aux questions bizarres posées par nos enseignants. Je me souviens aussi faire d’autres choses amusantes pour des raisons que j’ai aujourd’hui oubliées. Puis, un jour, tout est parti à la poubelle. A l’exception de quatre ou cinq pages blanches numérotées… Je pense qu’elles font à présent parties d’une collection privée en Italie. Vous souvenez-vous de votre première exposition ? Cela date de longtemps, elle a eu lieu dans une pizzeria. Avec des amis de mon lycée. Le restaurant s’appelait La Piazza Papa. J’y ai présenté de grands carrés de contreplaqué sur lesquels j’avais dessiné des images de majorettes en pyrogravure. Les clients du restaurant ont montré une indifférence totale quant à mon travail. Suite à cet échec, je me suis promis de ne plus jamais exposer dans une pizzeria. Qu’en est-il de votre première publication ? Peut-être, une série d’images pour un magazine féminin qui n’existe plus ? Je devais illustrer des tests de personnalité qui comportaient des questions telles que : « Dans quelle mesure arrivez-vous à perdre du poids ? » ou « Quel degré de séduction se dégagent de vos vêtements ? » ou mieux encore « Quel type d’enfant est fait pour vous ? » Comment une idée se produit-elle ? C’est assez simple, en réalité. Le projet m’est communiqué et les instructions me sont données. Je marche de long en large quelques temps. Deux ou trois idées émergent rapidement. Je m’assieds à mon bureau et dessine quelques ébauches. Je les explique ensuite à mon contact. Nous en discutons. Si tout se passe bien, je crée une œuvre finale. Je dois parfois recommencer. Une fois, deux fois… Et j’augmente mon tarif, comme tout le monde. Avez-vous jamais été attiré par la bande dessinée ? Certaines de mes images peuvent, en effet, être vues comme composant de petites histoires. Il s’agit souvent de dessins en noir et blanc. Des gags statiques, du graphique burlesque. Une image par idée, c’est ce que j’essaye de trouver. Un raccourci clair et direct. Un dessin sans légende mais où la confusion n’a pas de place. En ce qui concerne mon attirance pour la bande dessinée… J’ai tenté, adolescent, de raconter l’histoire de ma vie sur juste quelques pages. Tel que je vois cela aujourd’hui, cela était merveilleusement monotone… il y avait, par ailleurs, un nombre important de fautes d’orthographe. J’aime les classiques de la bande dessinée : Louis Forton, Alain Saint-Ogan, Benjamin Rabier, Calvo… Il m’arrive de temps de temps de copier un cadre, un personnage, un arrière-plan, un gros nez, une voiture, un arbre. Travaillez-vous à partir de photographies ? Je dessine à partir de photos que je trouve sur l’Internet, dans les magazines, etc. Il est possible de trouver des photos partout, sans discrimination. Aujourd’hui, par exemple, j’ai reçu une carte postale d’un ami qui présente un couple originaire de l’Alsace. Ils portent le costume folklorique traditionnel. Un point de départ très intéressant pour un joli dessin. Je collectionne les images. Je les conserve par série de cent, de mille. Pour vous donner un exemple : je possède une très belle collection d’images provenant de catalogues de collection de timbres. Parfois, si nécessaire, je prends les photos moi-même. Pour le catalogue A.P.C. j’ai photographié la plupart de mes amis et ma femme, seins nus. Tout s’est très bien passé. Quels matériaux utilisez-vous pour dessiner ? J’utilise ce qui est disponible. Par exemple : à la galerie Air de Paris, il y a plusieurs années, j’ai exposé des dessins d’un chien et de quelques chats. Ces dessins, dont le format était de 50 x 65 cm, étaient créés avec des stylos-feutres avec encre à base d’eau et mon propre sang. Je les ai intitulés, très simplement : avec mes feutres et mon sang. Mais le stylo à bille quatre couleurs est, sans aucun doute, mon outil de prédilection, depuis maintenant quelques années. Utilisez-vous ces stylos pour créer des surfaces texturées ? Non, j’utilise le stylo à bille quatre couleurs pour ne pas avoir à choisir mes couleurs. C’est aussi la raison pour laquelle je dessine sur un papier à taille prédéfinie. Généralement de l’A4. J’ai toujours eu un faible pour les fournitures de bureau. Je ne cherche jamais à créer de l’admiration pour la perfection d’une technique. J’aime l’idée que mon travail peut être réalisé par tout un chacun. Il suffit de tracer une photo et de la colorier avec soin. Il s’agit de reproduire une image de la façon la plus mécanique possible. Certains de mes amis ont essayé. C’est incroyable, vous pourriez croire que c’est du Jacques Floooret ! Les Français sont-ils plus théoriques que les Anglais ? J’aime lire certains essais théoriques. Je les trouve souvent divertissants. Ce passe-temps fait-il de moi un Français typique ? Je vous laisse juge. Avez-vous le sentiment de faire partie d’une scène ? Je dois certainement appartenir à une « scène ». Mais laquelle ? Humm, personne, jusqu’à présent, n’a eu la présence d’esprit de me le dire. Existe-t-il un style d’illustration à la française ? J’espère que non. Cela serait tout aussi inintéressant qu’un style purement homosexuel ou belge ou encore végétarien. Quand on pense à Paris, on pense « impressionnisme, cubisme, surréalisme, situationnisme, etc. » Comment définiriez-vous ce qui se passe à Paris actuellement ? Disons : pragmatisme… Mais cela est vrai partout de nos jours. Vous sentez-vous parfois oppressé par le passé ? Oui, parfois, peut-être. Mais il est beaucoup facile d’être oppressé par le présent. Êtes-vous originaire de Paris ? Je suis né à Chambéry en Savoie. Je vis à Paris car lorsque l’on naît dans une petite ville de province on rêve souvent de vivre à la capitale

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le quai 294M9 / la gare Le Quai(294M9) la Gare 140 route de la gare 71740 Saint-Maurice-lès-Châteauneuf France
Dernière mise à jour le 2 mars 2020