INCULTE FUTUR :

une exposition de MOOLINEX
Exposition
Arts plastiques
galerie arts factory Paris 11

Teaser grandeur nature d'une monographie à paraître dans les toutes prochaines semaines aux éditions Les Requins Marteaux, l'exposition "Inculte Futur" propose sur les quatre niveaux de la Galerie Arts Factory, un subversif état des lieux dédié à la production d'un artiste hors norme.

Insoumis avant l'heure, Jean-Philippe Simonnet n'est pas né dans la rue, mais à Nogent en 1966. Vous le connaissez mieux sous le nom de Moolinex, tant il écume depuis le début des années 90 la scène artistique française; du circuit alternatif aux lieux institutionnels les plus exigeants. Plasticien iconoclaste, il se frotte avec un humour revendicatif à toutes les matières, à toutes les formes, se remettant perpétuellement en question pour déverrouiller les portes qui cloisonnent bande dessinée, culture populaire et art contemporain. Réunissant un impressionnant ensemble de peintures récentes autour d'une sélection d'oeuvres emblématiques, "Inculte Futur" explore ainsi 25 ans de créativité sans filtre, au service d'une propagande maison. Entre regard désabusé sur les modèles de pensée dominants et la misère sociale qui en découle inévitablement, Moolinex ne nous promet clairement pas des lendemains qui chantent. Avec un sens bienveillant de la provocation, son programme à base de slogans définitifs nous prépare néanmoins à affronter - sourire (jaune) au bord des lèvres - l'inéluctable effondrement d'un système à bout de souffle.

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Camille de Singly, commissaire de la première mouture de l'exposition présentée cet automne dans le cadre de la manifestation "L'art est ouvert" en Dordogne, revient sur quelques balises d'un parcours déjà bien rempli : 

Quand Jean-Philippe Simonnet naît à l’art au début des années 1990, le jeu du pseudonyme a saisi toute une génération de créateurs indépendants, croisant la musique, l’illustration, la bande dessinée. Pakito Bolino, Fredox, Kerozen, Duralex, après Kiki et Loulou Picasso, Captain Cavern ou Placid et Muzo … Simonnet devient Moulinex* , comme l’entreprise française homonyme, symbole d’un monde industriel dont Simonnet veut s’extraire. A l’évidence aujourd’hui, ce nom dit aussi quelque chose d’une œuvre à venir, celle d’un artiste qui échappe à toute catégorisation, et transforme - mixe ? – ce qu’il touche, voit, entend. Avec violence et douceur. 

En 1992, à Nogent-sur-Marne, Moolinex crée avec un copain un premier fanzine, Flow-Pow, pied-de-nez au Flower Power des hippies. Brandissant le qualificatif de "banlieusard" comme un étendard guerrier, ils imposent à leur fanzine une esthétique "deluxe", un croisement de fanzine punk et des belles couvertures en couleur de Métal Hurlant. L’aventure s’arrête assez vite, mais Moolinex est lancé. Il est embauché par la Fanzinothèque de Poitiers comme sérigraphe en 1995, et développe en même temps son propre travail, des dessins édités par Le Dernier Cri, structure d’édition alternative alors située à Paris. 

Avec des amis (Pierre Druilhe, Guillaume Bouzard et Olivier Besseron), Moolinex produit des scénographies pour des concerts, à base de peintures géantes. Tous les quatre rencontrent à Angoulême la première équipe des Requins Marteaux, Bernard Katou, Guillaume Guerse et Marc Pichelin, et s’installent avec eux en banlieue d’Albi, à Saussenac. En 1996, ils lancent la première formule de la revue Ferraille qui se donne pour vocation d'être un "Mickey trash", et Moolinex y inscrit sa série Flip & Flopi consacrée à deux garnements dont la vie est faite de sexe et de conneries. Son dessin pose les bases d’une nouvelle BD; les héros ne sont plus dessinés de la même manière d’une case à l’autre. En changeant son dessin librement, selon le fil de la narration et l’évolution de ses personnages, Moolinex contribue à libérer la BD de la fabrication en série usinée, standardisée. C’est ce chemin que choisissent aussi de prendre d’autres auteurs de la même génération, on pense notamment à Matt Konture ou Winshluss.

De retour à Poitiers en 1998, Moolinex déniche "un vieux carnet jaunasse et pourri" dans le hangar du Confort Moderne et commence à y dessiner. C’est le début d’une longue série de carnets, faits la nuit. Ils sont imprimés au fur et à mesure par Le Dernier Cri, de 2000 à 2004, à 400-500 exemplaires. 

Chaque carnet s’intitule Art Pute, terme que Didier Bourgoin définit comme la "narration ludique et cryptée de ses frustrations scolaires et tourments existentiels". C’est le début, aussi, d’une prise de conscience importante qui oriente toute une partie de la production à venir : en utilisant des supports perdus, Moolinex s’affranchit de sa hantise profonde de "gâcher", héritée des périodes de vaches maigres de son enfance. Anciens livres d’enfants repeints intégralement, supports salis volontairement au café et au tabac… Et le désir, toujours, de "ne pas avoir de main, de pli, d’échapper à toute forme de normalisation, d’habitude, qui enfermerait le dessin". 

En 2003, Moolinex s’attaque au canevas; une pratique de loisir populaire avec des motifs gentillets. Moolinex y injecte des aphorismes politisés, réalisés avec une agressive palette rouge et noir : "Une bonne victoire, un bon bain de sang et au lit !". Le détournement de canevas n’est pas une pratique nouvelle, mais pour Moolinex, il ne s’agit pas tant d’interroger l’inégalité de traitement des hommes et des femmes en matière de création, que de souligner la propension de l’homme à "faire de l’usine quand il est en loisir", tant la technique du point de croix est répétitive et demande le même type de concentration que celle du travail à la chaîne. En 2009, Moolinex expose ces oeuvres au Confort Moderne sous le titre Poing de croix. Il y intègre une nouvelle série de broderies sur tissu blanc, dérivée des napperons d’antan, qu’il pose sur des objets domestiques comme des armes à retardement. Du concentré révolutionnaire et de la provocation sexuelle en kit de décoration kitsch. 

A l’aube des années 2010, Moolinex rencontre l’artiste Aurélie William Levaux, qui l’attire vers la Belgique et l’embarque dans plusieurs aventures dont celle de Johnny Christ et de La Réponse. Une parenthèse de "couple icône", qui explose lors de l'exposition Notoriété Discrète en 2015, dont Moolinex renaît déterminé à "sortir de l’underground pour que les gens voient (ses) travaux". Cette envie en croise une autre, celle d’affirmer une œuvre, de lui donner une place, une durée ... "faire du viable" .

* moulinex deviendra moolinex au milieu des années 2000, fils d’un ouvrier et titulaire d’un cap d’ajustage, il se destine lui aussi à travailler en usine.

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Horaires

du lundi au samedi de 12h30 à 19h30

Adresse

galerie arts factory 27 rue de Charonne 75011 Paris 11 France

Comment s'y rendre

accès mobilité réduite possible uniquement pour le rez-de'chaussée [ espace librairie ]

Dernière mise à jour le 13 octobre 2022