Maja Bajević (avec Emanuel Licha), Green, Green Grass of Home, 2002. Vidéo, 17'57''
Cet article, carte blanche à Sasha Baydal, fait suite au travail que ielle a entamé au Cnap au printemps 2022, en tant que lauréat.e. de la bourse de recherche curatoriale. La recherche de Sasha Baydal a - entre autres - porté sur plus de 600 dossiers d’œuvres et d’artistes issus de, ou liés, aux pays dits « (post)socialistes » et « (post)soviétiques ». Ses conclusions et ses interrogations engagent le Cnap à poursuivre le travail, notamment en termes de documentation, de catalogage, de réflexions critiques et de partage de ses collections.
« Jusqu’à très récemment le contexte artistique français, parallèlement au système épistémique dominant, ignorait largement – mais comme il s’avère, à des degrés variables – des pratiques artistiques et curatoriales contemporaines issues de ou liées aux pays post-socialistes d’Europe, d’Asie Centrale et de Caucase du Sud. Celles-ci étaient couramment vues comme arriérées ou non pertinentes, étaient parfois complètement ignorées ou – au mieux – traitées comme un cas à part. Alors que l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie a vraisemblablement fait basculer plusieurs grands repères et les vieilles dynamiques entre le « centre » (ou du moins des lieux qui s’imaginent en tant que « centre ») et les dites « périphéries », je me pose la question de la durabilité des nouveaux équilibres dans une situation où les anciens schémas coloniaux et l'empathie entre empires perdurent. Cet essai écrit à l’issue de la Bourse de recherche curatoriale du Centre national des arts plastiques s’engage avec le passé et le présent de ces dynamiques par le biais de l’art et des études postcoloniales soviétiques, de ma recherche et de mon expérience, tout comme il s'adresse au futur. En ce sens, je cherche par cet article à affirmer, dans les milieux culturels français, une place, une voix et une agentivité propres aux travailleureuses de l’art – artistes, curateur·rice·s, chercheur·e·s, critiques – issu·e·s de ou associé·e·s aux espaces géographiques et culturels que l’on réunit souvent sous les ombrelles « espace post-soviétique » ou « pays post-socialistes », tout en questionnant les dynamiques coloniales inhérentes et les hiérarchies que celles-ci produisent aussi bien en leur sein qu’à l’extérieur. [...] »
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