Screen Memories / Alexandra Hopf

Exposition personnelle d'Alexandra Hopf à la Galerie Sobering
Exposition
Arts plastiques
sobering Paris 03

Alexandra Hopf, Board #2 and Board #4, 2014, gouache, oil pastel on paper, mounted on acrylic glass, 130 x 110 cm, Courtesy the artist and Sobering Galerie

Dans le chapitre « Souvenirs d'enfance et souvenirs-écrans », de son ouvrage Psychopathologie de la vie quotidienne*, Sigmund Freud s’intéresse aux souvenirs d’enfance et met en lumière le fait que la plupart d’entre eux « se rapportent […] à des choses indifférentes et secondaires alors qu’il ne reste dans la mémoire des adultes aucune trace […] des impressions fortes et affectives de cette époque ».

Le souvenir-écran oppose la netteté du souvenir à son insignifiance apparente. Cependant, l’analyse de son contenu révèle des étapes significatives de l’enfance ainsi que certains fantasmes enfouis.

Tel le procédé de l’amphibologie littéraire, le souvenir-écran présente une double lecture, qui tend à brouiller les pistes.

Alexandra Hopf inscrit son travail dans cette lignée en engageant une réflexion sur l’interprétation du regardeur quant à l’objet qui lui fait face. L’ambiguïté de la perception est un aspect important de son œuvre, qui oscille d’une dualité à l’autre, entre original et copie, entre ligne et couleur, entre volume et planéité.

Du terme « écran » découlent les notions d’interface, cadre, support, panneau, séparation…  Plus largement « l’écran » induit une obstruction, un voile tendu entre deux extrémités, qui se font face sans pourtant communiquer. 

Construite comme une cartographie exploratoire, les séries Board et  Contract s’affranchissent de la toile et du châssis traditionnels pour investir un matériau équivoque, qui suggère en filigrane la notion de copie. Après avoir apposé la couleur, l’artiste trace des lignes qui révèlent le matériau caché. Naît ainsi la confusion entre le papier carbone, symbole implicite de la reproduction et la peinture originale de l’artiste. Les lignes sont parfois concentrées, la plupart du temps irrégulières, créant un mouvement dans l’œuvre traitée comme un négatif.

Le « souvenir-écran » évoque l’idée d’une réécriture au croisement entre les mécanismes de défense et de refoulement : s’opère alors une stratification du souvenir, noyé sous sa superficialité apparente. Un parallèle peut être établi avec le palimpseste, ce manuscrit dont les inscriptions sont effacées afin de pouvoir y écrire à nouveau. En outre, les œuvres d’Alexandra Hopf s’y apparentent, plus spécifiquement la superposition de couches qui ne peuvent être découvertes que par une exploration minutieuse.   

La série Kojève’s Diary est une référence explicite à Alexandre Kojève, philosophe français d'origine russe, qui a renouvelé l'étude de Hegel en France et s’est largement positionné sur la question de la fin de l'Histoire. Le journal symbolise l’intimité, à l’instar des lignes présentes dans la série Contracts. L’artiste ne traite pas ici de l’Histoire au sens large, mais d’une histoire sensible et subjective.

Les séries The Stella Files et Combined Piece (Piece of Stella), quant à elles, sont une référence à Frank Stella, artiste américain précurseur du minimalisme. Ses œuvres, influencées par le Bauhaus, interrogent le statut de l’image, qui n’est plus une représentation mais un objet.

Le traitement des surfaces dans les compositions d’Alexandra Hopf s’inscrit dans la lignée du minimalisme et du constructivisme. Seuls les reliefs du papier de soie et des lignes tracées s’ajoutent à la couleur. Il existe, dans son œuvre, une part non intentionnelle où l’artiste oppose la chance à l’intention.

Par cette esthétique de la dissimulation, Alexandra Hopf, dans son exposition personnelle Screen Memories, interroge ce qui ne peut être directement vu et parvient, par là même, à le révéler.

 

* FREUD, Sigmund, Psychopathologie de la vie quotidienne, Application de la psychanalyse à l’interprétation des actes de la vie quotidienne, Traduction par Samuel Jankélévitch, Payot & Cie, 1922 (pp. 50-59).

 

Complément d'information

Exposition du 12 mars au 14 avril 2015
Vernissage le 12 mars, de 18h à 21h

Horaires

Mardi-Vendredi: 10h-19h Samedi: 11h-19h

Adresse

sobering 87 rue de Turenne 75003 Paris 03 France

Comment s'y rendre

Metro Saint-Sébastien-Froissart
Dernière mise à jour le 13 octobre 2022