Zones blanches

D’abord, il y a une série de photographies : celles de l’expédition polaire suédoise Andrée, trois hommes partis en ballon vers le Pôle Nord à la fin du XIXe siècle. Ils ont erré pendant des mois sur la glace, ont disparu pendant trente ans jusqu’à ce qu’un baleinier retrouve leurs corps, leurs journaux d’expédition et des rouleaux entiers d’images de leur errance — tout ce qui reste aujourd’hui de ce voyage avorté.

Ces photographies sont un témoignage et une empreinte directe du paysage : la neige, le temps les ont façonnées. Elles sont un récit autant qu’une mise en scène, une manière, pour les explorateurs, de tenter un partage impossible, d’installer une distance avec leur expérience. Elles posent la question de la représentation du voyage, de la façon dont on le transmet, dont on le documente, dont on crée une narration qui finit par se substituer au voyage réel — question dont se sont abondamment saisi les artistes et les auteurs contemporains.

Prenant ces documents comme point névralgique et point de départ, et parallèlement au livre en cours d’Hélène Gaudy qui remonte le récit de ces photographies, l’exposition explorera ce décalage entre le voyage et la manière de le rendre visible, donc de le transformer, de le mettre en scène.